Éric Reinhardt

La question du moment où un destin tout tracé bifurque (ou pas !), ce hasard objectif cher à Mallarmé, André Breton et aux surréalistes, est au cœur de l’œuvre d’Éric Reinhardt et de son nouveau roman Comédies françaises. Les épiphanies artistiques aussi. Est-ce que la rencontre d’une œuvre peut changer le destin d’une personne ? Éric Reinhardt, notre invité, aborde ces thèmes à travers une sélection d’œuvres passionnantes.

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En Physique

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    Jeanne Dielman, 23 Quai du Commerce, 1080 Bruxelles

    Chantal Akerman - Video - Carlotta - 1976

    Chantal Akerman est une cinéaste qui me manque bien que je ne l’ai jamais rencontrée. Elle me manque parce que je sais que jamais plus je ne verrai de nouveaux films de Chantal Akerman. Jeanne Dielman est l’un de ses premiers, un film fondateur, qui montre Jeanne Dielman, chez elle, occupée à des tâches domestiques, à travers des plans fixes extrêmement longs et merveilleusement bien construits, chaque plan est un bonheur visuel. On voit donc Jeanne Dielman s’occuper de sa maison comme dans un inventaire presque exhaustif des gestes du quotidien, comme une sorte de hors champ du cinéma où on montre habituellement l’action, où on concentre son intérêt sur ce qui se passe d’intéressant. Là, au contraire, le film repose sur la monstration de gestes normalement invisibles : éplucher des patates, préparer des escalopes panées, épousseter des figurines de porcelaine, récurer la baignoire, se laver soi-même. Mais il se trouve que cette femme, Jeanne Dielman, est aussi une prostituée. Et cette longue litanie de gestes domestiques n’est interrompue que par la sonnerie de la porte et l’arrivée des clients qu’elle conduit dans sa chambre où, au préalable, elle a installé, au centre du lit, une serviette dont on comprend qu’elle est là pour protéger le couvre-lit des ébats qui vont suivre. C’est un film envoûtant, hypnotique, sans musique, comme une espèce de chorégraphie du quotidien. Delphine Seyrig interprète Jeanne Dielman, dense, précise, tout en intériorité, sublime. C’est un film pour moi métaphysique qui parle de la solitude, de la monotonie de la vie, du retour chaque jour des mêmes rituels consacrés à notre propre entretien, à notre propre survie. Une puissante angoisse souterraine irrigue le film qui nous renvoie à notre finitude, à la vanité de toutes choses, d’ailleurs le film se termine par l’irruption d’un geste (le seul du film qui soit un geste de fiction pour ainsi dire) aussi salvateur que désespéré, définitif. 

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    Louise Bourgeois

    Camille Guichard - Video - Arte éditions - 2012

    Louise Bourgeois est sans doute mon artiste préférée. Son œuvre plastique me touche et même me trouble profondément. Tout particulièrement ses Rooms, qui sont comme des sculptures autour desquelles on tourne et dont on regarde l’intérieur, en étant presque indiscret, par des portes et des fenêtres, c’est très intime et on franchit un interdit. On sent dans le travail de Louise Bourgeois qu’elle plonge au plus profond de l’inconscient, de son passé, de ses peurs d’enfant, de ses souvenirs de la période où elle vivait en France. Son œuvre est traversée de thèmes récurrents comme la maternité, le corps, la maison, l’enfance, la nostalgie, l’amour, le couple, l’avilissement par la famille… thématiques qui me parlent profondément. N’oublions pas non plus qu’à son époque, c’était très difficile pour une femme de devenir une artiste reconnue (elle accède à la reconnaissance tardivement, dans les années 1980), les grands artistes, au regard de la société, étant toujours des hommes. Et Louise Bourgeois a construit une œuvre immense en prenant à contre-pied la vision masculine du Grand Art, en utilisant le langage et le vocabulaire même de la féminité telle que « caricaturée » par les hommes comme n’étant pas digne d’intérêt ni sérieux. Louise Bourgeois a en partie accédé au statut de « grand artiste » par des petites choses, des assemblages, des idées fixes, des petits bricolages, la couture, la broderie – sa mère était restauratrice de tapisseries anciennes -, comme on pourrait s’occuper de sa maison. Et cette ironie, aller combattre les hommes sur leur soi-disant terrain en utilisant ce qui, à leurs yeux, disqualifie les femmes, je trouve ça absolument génial et réjouissant.

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    Les Années

    Annie Ernaux - Livre - Gallimard - Folio - 2008

    Comme Louise Bourgeois, Annie Ernaux est une artiste qui travaille beaucoup à partir de moments de sa vie, comme son avortement dans L’Évènement (2000), ou, dans Passion simple (1992), son assujettissement à une passion qui l’a complètement dominée, réduite à l’état de chose et fait perdre son entendement. Un livre sublime. Annie Ernaux a de mon point de vue la plus belle écriture en langue française aujourd’hui. Par exemple dans Les Années (2008), qui raconte des fragments de sa vie avec une langue ample et précise, délicate et rigoureuse, ciselée, très pure, presque classique (un classicisme très contemporain si je puis dire) par laquelle elle parvient à transcender les situations extrêmement intimes et personnelles qu’elle raconte pour atteindre à l’universel (ce que n’arrivent pas à toujours accomplir ses très nombreux disciples). Dans ce livre admirable, Annie Ernaux balaie plusieurs décennies à travers l’examen de photographies sur lesquelles elle est représentée à travers les époques, de sa petite enfance jusqu’à aujourd’hui. Elle décrit les photos, parle du contexte politique, sociologique, livre ses souvenirs, à la troisième personne. C’est comme une histoire de France des années d'après-guerre à aujourd’hui par le biais de souvenirs personnels. La France des trente glorieuses, des années pompidoliennes, de Giscard, de Mitterrand… En plus de l’écriture, parfaite, la forme même de ce livre est géniale. Je pense qu’Annie Ernaux devrait avoir le Prix Nobel ! 

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    Rebecca Manzoni
  • Perturbation

    Thomas Bernhard - Livre - Gallimard - L’Imaginaire - 1967

    J’ai découvert Thomas Bernhard vers l’âge de dix-huit ans (à une époque où tout le monde le lisait, de même que Kundera) et je ne m’en lasse pas. A certaines périodes de ma vie je le relis et c’est assez dangereux parce que chaque fois je me dis qu’en réalité je n’ai besoin d’aucun autre écrivain que Thomas Bernhard, il se suffit à lui-même… Perturbations raconte l’histoire d’un jeune homme qui suit son père, médecin de campagne, dans ses tournées auprès de ses patients. Dans l’Autriche profonde, à travers la campagne et de maison en maison, on est confronté à des réalités socio-culturelles différentes, des gens les plus pauvres à l’aristocrate qui vit dans son château. Tout m’enchante chez Thomas Bernhard et l’effet qu’ont sur moi son intelligence, sa mélancolie, sa langue puissante, son esprit mordant et irrévérencieux s'amplifie avec les années. Comme tous les grands, il a inventé sa propre esthétique, qui ne vieillit absolument pas et m’impressionne toujours davantage. Ses livres d’un seul tenant, sans chapitre, sans retour à la ligne, sa logorrhée puissante, son esprit obsessionnel et sa langue qui ressasse sans cesse les mêmes motifs, ces tourbillons tenus d’une main de fer me stupéfient. Et j’ajouterai que sa rage, sa solitude, parce que c’est un vrai misanthrope, sa méchanceté, son violent refus du conformisme sont, à notre époque, un contre poison salutaire.

  • Igitur - Divagations - Un coup de dés

    Stéphane Mallarmé - Livre - Gallimard - Poésie - 1897

    Quand j’ai lu Mallarmé pour la première fois, à l’âge de vingt ans, il m’a immédiatement fasciné par la beauté plastique de ses vers, mais aussi par le caractère très personnel, étrange, de sa langue en prose, qui est presque cryptée. La densité extrême de ses alliages de mots, la dureté de diamant de ses vers résistent à la compréhension mais produisent des éclats et des effets incomparables. Mallarmé est réputé difficile, voire incompréhensible, et il l’est en grande partie, mais peu importe. Moi je le lis à deux niveaux : la seule confrontation de ma sensibilité à ses vers, à la façon dont il parvient à déshabiller les mots de leur usage courant pour nous les faire apparaître comme pour la première fois me procure un plaisir esthétique inouï. Et puis, dans un second temps, il y a la compréhension du poème, qui procure un autre plaisir. On vainc la résistance des vers qui sont comme des énigmes complexes, qui parfois nécessitent l’assistance d'exégètes, et c’est alors un plaisir non plus sensoriel mais intellectuel. Ce n’est pas parce qu’on ne comprend pas qu’on ne peut pas éprouver une émotion esthétique, d’ailleurs. Car, indépendamment du sens il y a les sonorités, le rythme, la troublante déconstruction de la phrase, des raccourcis fulgurants, les étincelles provoquées par deux mots qui se heurtent… D’ailleurs Mallarmé a écrit : “Le vers qui de plusieurs vocables refait un mot total, neuf, étranger à la langue et comme incantatoire”. En fait, chaque vers est comme un mot nouveau en effet, le nom de l’état ou de la sensation qu’éveille en vous sa lecture… Régulièrement je reviens à Mallarmé et c’est comme ouvrir une bouteille de parfum oublié, je retrouve en moi instantanément ces mêmes sensations, ce même état immuable malgré les années qui passent…

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    Le Procès

    Franz Kafka - Livre - Gallimard - Folio - 1925

    Kafka est sans doute l’écrivain qui a pour moi le plus d’importance. Chaque fois que je le relis, je suis subjugué par la puissance et la rigueur presque mathématique de sa phrase, émerveillé de constater à chaque ligne à quel point elle est conductrice d’intelligence. Sa phrase pense. C’est miraculeux. Ce n’est pas Kafla qui pense, c’est sa phrase, c’est toute la différence et rien ne m’assouvit plus que cela. Il y circule en plus une forme de distance, d’ironie, de folie, une pudeur, tout ça dans l’énergie, dans le mouvement de chaque page. Le Procès est construit en longues scènes qui sont presque en « temps réel ». Chaque chapitre nous enferme dans sa propre dramaturgie comme dans un lieu clos. C’est la grande leçon que m’a donnée Kafka. Dans mes romans, je fais toujours progresser la narration par de grandes scènes, je fais se succéder de longs moments qui sont comme des plans séquences par lesquels j’essaie de donner à voir et à sentir, à penser, le plus de choses possibles, par le regard et par le corps d’un personnage, depuis un point de vue unique. Comme s’il fallait aller dans le ventre du livre, loin à l’intérieur, dans une forme de densité immarscecible. Avec Kafka, par son écriture, on est plongé au plus profond du moment présent, dans la situation que vit le personnage, au plus près de sa pensée intime. 

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    Romeo Castellucci

    Julien Condemine - Video - La compagnie des Indes - 2018

    Parfois je me laisse aller à dire que Romeo Castellucci est le plus grand génie d’aujourd’hui, toutes disciplines confondues ! Romeo Castellucci est un metteur en scène de théâtre, un plasticien aussi puisqu’il a fait l’Académie des beaux-arts de Bologne. La première œuvre que j’ai vue de lui, c’était Jules César au Festival d’Avignon en juillet 1998. Ça a été pour moi une expérience inouïe, peut-être la plus sidérante de ma vie d’amateur d’art ! C’est rare d’être le contemporain exact de l’apparition d’un chef d'œuvre. Peut-être ceux qui ont vu Les Demoiselles d’Avignon dans l’atelier de Picasso, en 1907, ont-ils eu ce choc ! Dans ce spectacle il y avait déjà tout ce que j’aimerai plus tard. Il n’y avait quasiment aucune phrase de Shakespeare, c’était une pure expérience visuelle, une succession de scènes et de tableaux où des comédiens se livraient à une sorte de rituel, comme une messe, une liturgie, une cérémonie, qui faisaient advenir sur le plateau une forme de transcendance, de mystère. Pas la représentation d’un mystère, mais le mystère lui-même. C’est un peu comme s’il exauçait le fantasme de Mallarmé d’un théâtre qui soit de l’ordre de la présence et non de la représentation. Faire advenir une forme de divin. Romeo Castellucci cherche à toucher l'indicible et toujours avec les moyens du bord. Il arrive à nous emmener dans des représentations hallucinantes avec du tulle, des plumes, un ventilateur, du carton, des tissus… C’est un illusionniste qui parvient à créer de la poésie pure. Il crée des moments de théâtre sidérants de puissance et de beauté. Toutes les choses que j’ai vues de Romeo Castellucci m’ont sidéré. 

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    Anne Teresa De Keersmaeker ; Rosas 2007-2017

    Ann Van Aerschot, Christian Dumais-Lvowski - Livre - Actes Sud - 2018

    Anne Teresa De Keersmaeker est une artiste qui m’impressionne depuis longtemps et dont le travail ne cesse de se renouveler. Elle ne tombe jamais dans une répétition systématique et vaine d'elle-même dans laquelle peuvent parfois échouer les artistes. Vortex Temporum est une œuvre chorégraphique inspirée d’une partition du même nom de Gérard Grisey, compositeur du courant de la musique spectrale que j’écoute régulièrement depuis que je l’ai découvert avec ce spectacle. La particularité de ce spectacle est que les musiciens sont aussi mobiles que les danseurs. Même le piano est monté sur roulettes et le pianiste joue debout. Comme souvent chez Anne Teresa De Keersmaeker, la chorégraphie de Vortex Temporum est une espèce de tournoiement en forme d’ellipse ou de spirale. Il y a au sol à la craie blanche le dessin d’une rosace - qui fait écho dans ma sélection aux rosaces de Louise Bourgeois dans ses Insomnia Drawings ! – entraînant un maelström incessant dans lequel les musiciens et les danseurs s’entrecroisent, s’arrêtent… C’est une œuvre que j’ai vue trois fois, ainsi que dans sa version muséale, au Centre Pompidou, et qui chaque fois m’a rempli d’une émotion unique. Anne Teresa De Keersmaeker est dans une recherche d’une grande exigence artistique et en même temps elle communique des émotions simples, universelles. C’est en même temps sensoriel et cérébral, et c’est très rare.

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    Tadao Ando

    Frédéric Migayrou - Livre - Flammarion - 2019

    S’il y a un voyage à s’offrir absolument si l’on aime le Japon, l’art contemporain et l’architecture, c'est l’île de Naoshima, où un milliardaire a commandé à Tadao Ando un hôtel-musée. Tout le monde peut visiter le musée et y voir des œuvres de Richter, Cy Twombly… mais, si on réside dans l’hôtel, comme je l’ai fait il y a quelques années, après la fermeture du musée on peut la nuit sortir de sa chambre et se promener dans les salles au milieu des œuvres d’art ! Sur Naoshima, Tadao Ando a également construit le Chichu Museum, qu’il a conçu comme un long chemin de recueillement qui nous éloigne du réel pour nous dépouiller des pensées parasites et nous conduire jusqu’aux œuvres. Quand on entre dans ce musée, il y a une succession de couloirs, d’escaliers, de coudes, de murs inclinés qui brouillent la perception et les repères spatio-temporels pour mettre le visiteur en condition. Ce long parcours pour arriver aux œuvres est une dramaturgie sensorielle, un chemin de méditation qui modifient l’état intérieur du visiteur. Et une fois devant les Nymphéas ou la pièce vertigineuse de James Turrell, on a déjà la sensation d’avoir fait l’expérience, avec son corps, sa sensibilité, son regard, d’une œuvre d’art troublante, celle du bâtiment. Oui, le Chichu Museum est en soi une œuvre d’art de premier plan, et pas seulement un magnifique écrin, comme le sont généralement les musées. Vivre l’architecture de Tadao Ando et s’abandonner à elle, se laisser atteindre et contaminer par les sensations qu’elle délivre, c’est quelque chose d’unique. 

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    Le Trou

    Jacques Becker - Video - Studiocanal - 1960

    Je devais avoir dix-sept ans quand j’ai vu Le Trou et ce film a eu une grande importance dans ma vie. Durant mon adolescence, je me vivais un peu comme un prisonnier. J’habitais dans un lotissement à une quarantaine de kilomètres de Paris. J’aspirais à vivre enfin ma vie, à naître enfin à moi-même et au monde en allant m’installer à Paris après le Bac. J’entrevoyais le jour où je pourrais m’enfuir de ce lotissement et devenir écrivain, tomber amoureux… avec la peur très puissante que je pourrais ne jamais y arriver et que ma vie ne soit qu’une succession de déceptions. A cette époque, bien avant Internet, la seule façon de voir des grands films, c'était tard le soir à la télévision, le vendredi et le dimanche. Le Trou, c’est l’histoire de prisonniers qui se mettent à creuser un tunnel pour s’évader. L’histoirese passe intégralement dans une prison. Le seul plan où on voit l’extérieur, c’est quand deux des prisonniers parviennent à atteindre et à soulever une plaque d’égout depuis leur tunnel. Ils passent le regard au ras du bitume, et là Paris est à portée de main, comme une vision dans laquelle ils pourraient sauter ! C’est sublime… Comme l’évasion doit se faire en groupe, ils rebroussent chemin et vont retrouver le reste de la bande. J’ai vraiment reçu un choc inoubliable au moment où cet ailleurs rêvé est à portée de main des deux prisonniers, sous leurs yeux. C’est aussi la sensation de l’irréversible, l’idée qu’il faut savoir saisir sa chance et entrer dans l’image quand elle se présente furtivement… Dans notre vie de tous les jours, au cœur du réel, on peut accéder à une forme d’au-delà, par des épiphanies, les sensations puissantes qu’on peut éprouver… Ce film a été comme une leçon, je me suis dit que ma vie ça serait de trouver le passage vers la beauté, la liberté.

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    Kids See Ghosts

    Kid Cudi - Audio - Def Jam - 2018

    J’écoute énormément Kid Cudi. C’est un rappeur américain qui n’a pas la notoriété de Kendrick Lamar ou Frank Ocean - que j’écoute aussi beaucoup - mais qui est pour moi un tempérament fascinant. C’est dostoïevskien ! Il a d’ailleurs fait plusieurs séjours en hôpital psychiatrique, c’est quelqu’un d’habité, on sent dans sa voix qu’il a fait l’expérience des gouffres. Et puis c’est un dieu de la mélodie. Il y a une richesse et une invention stupéfiante dans les arrangements et les effets. Si j’aime Kendrick Lamar, Frank Ocean ou Kid Cudi, c’est parce qu’ils n’écrivent pas seulement des chansons, ils conçoivent et font se déployer autour de l’auditeur de véritables espaces sonores, comme sur une scène de spectacle vivant, c’est l’équivalent de ce que fait Romeo Castellucci mais en musique, ils creusent l’espace avec des sons, avec les voix, il y a des lointains, il y a des bruitages, il y a des atmosphères… au lieu de tirer une ligne mélodique plus ou moins bien orchestrée, comme le font généralement les auteurs de chansons. Là on est propulsé dans des mondes. On fait une expérience sonore. Kid Cudi est un compagnon de route et d’écriture depuis déjà quelques années. 

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    Comédies françaises

    Éric Reinhardt - Livre - Gallimard - 2020

    Eric Reinhardt trouve par hasard le thème de Comédies françaises un matin qu’il découvre, dans Libération, que la reine d’Angleterre va récompenser quatre pionniers d’Internet, dont le Français Louis Pouzin à l’origine de la transmission de données électroniques par paquets, le datagramme, principe fondamental d’Internet. « Je me suis dit qu’une personne, à un moment, forcément, avait dit non à l’invention de Louis Pouzin,». Pour mener l’enquête, Eric Reinhardt invente Dimitri, un jeune journaliste qui court après une femme croisée à plusieurs reprises dans des lieux éloignés, et qui se passionne pour l’histoire de l’invention d’Internet. « Ce pourrait être austère, raide, mais, de son matériau documentaire autant que de son intrigue sentimentale, Eric Reinhardt fait un usage virevoltant. Sa langue souple, rieuse (avec son art consommé de rapporter les discours) s’adapte à tous les changements de ton et de tempo que l’auteur impulse à son roman pour en décupler l’intérêt esthétique et la drôlerie. Mais aussi pour faire le compte des forces, occultes ou visibles, grandes et petites, qui agissent les individus et les sociétés. » Raphaëlle Leyris – Le Monde


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